La Cour de cassation réaffirme que la PCH versée par les Conseils Généraux ne donne pas lieu à recours subrogatoire
La Cour de cassation réaffirme que, en l’état du droit, il résulte des articles 29 et 33 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 que seules doivent être imputées sur l’indemnité de la victime réparant son atteinte à l’intégrité physique les prestations versées par des tiers payeurs ouvrant droit au recours subrogatoire.
La prestation de compensation de handicap n’étant pas mentionnée dans ces textes ne donne pas lieu à un tel recours.
Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du jeudi 2 juillet 2015
N° de pourvoi: 14-19797
Publié au bulletin Rejet
Mme Aldigé (conseiller doyen faisant fonction de président), président
Me Haas, SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, avocat(s)
Texte intégral
LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Montpellier, 22 avril 2014), que Mme X…, victime le 9 mars 2005 d’un accident de la circulation impliquant un véhicule conduit par M. Y… et assuré auprès de la société Axa France IARD et un véhicule en stationnement appartenant à M. Z… et assuré auprès de la Mutuelle d’assurance des travailleurs mutualistes, a fait assigner notamment M. Y…, la société Axa France IARD, M. Z… et la Mutuelle d’assurance des travailleurs mutualistes en indemnisation de ses préjudices ; que par un jugement devenu définitif du 20 février 2007, il a notamment été décidé que Mme X… avait commis une faute lors de l’accident ayant pour effet de limiter l’indemnisation des dommages qu’elle a subis à 50 %, et, avant dire droit sur son préjudice, une expertise médicale a été ordonnée ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu que Mme Colette X…, M. Christophe X… et M. Frédéric X… font grief à l’arrêt de fixer le préjudice global de Mme X…, après limitation de son droit à indemnisation de 50 %, aux sommes de 653 872,49 euros en capital, une rente trimestrielle de 14 417,50 euros à compter du 1er avril 2014 jusqu’au 31 mars 2018 au titre de l’assistance par une tierce personne, correspondant à un capital annuel de 57 670 euros et, au regard de la répartition des responsabilités à concurrence de 70 % pour M. Y… et de 30 % pour M. Z…, de condamner in solidum M. Y… et la société Axa France Iard à payer à Mme X… la somme de 457 710,74 euros en capital et une rente trimestrielle de 10 092,25 euros du 1er avril 2014 au 31 mars 2018 et de condamner in solidum M. Z… et la société Matmut à payer à Mme X… les sommes de 196 161,75 euros en capital et une rente trimestrielle de 4 325,25 euros du 1er avril 2014 au 31 mars 2018, alors, selon le moyen, que parmi les prestations versées à la victime d’un dommage corporel, seules celles susceptibles de faire l’objet d’un recours subrogatoire contre la personne tenue à réparation ou son assureur, qui sont limitativement énumérées par les articles et 32 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985, doivent être déduites de l’indemnité mise à la charge de la personne tenue à réparation ou son assureur ; que la prestation de compensation du handicap, qui incombe au département, ne figure pas au nombre de ces prestations ; que, par suite, en se fondant, de manière inopérante, sur le caractère indemnitaire de cette prestation pour la comptabiliser dans les débours des tiers-payeurs et la déduire de la part à charge pour la victime, la cour d’appel a violé les articles 29 et de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985, ensemble l’article L. 245-1 du code de l’action sociale et des familles ;
Attendu que, pour évaluer le préjudice concernant l’assistance par tierce personne, l’arrêt énonce que si les sommes versées par le RSI Languedoc-Roussillon au titre de la « majoration tierce personne » doivent être déduites, il y a lieu tout autant de déduire celles versées par le conseil général du Gard au titre de la prestation de compensation du handicap qui revêt un caractère indemnitaire ; qu’il s’évince des dispositions des articles L. 245-1 et suivants du code de l’action sociale et des familles, dans sa rédaction issue de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005, que la prestation de compensation du handicap doit être déduite du montant versé à la victime au titre de l’assistance par une tierce personne, en ce qu’elle a le même objet, au sens de l’article L. 245-4 du code précité et qu’au demeurant, en application de l’article L. 245-7, alinéa 3, du même code, les sommes versées au titre de cette prestation ne font pas l’objet d’un recouvrement à l’encontre du bénéficiaire lorsque celui-ci est revenu à meilleure fortune ;
Mais attendu que si c’est à tort que la cour d’appel se détermine ainsi et comptabilise dans une rubrique intitulée débours tiers payeur les sommes versées au titre de la prestation de compensation du handicap, alors qu’il résulte des articles 29 et 33 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 que seules doivent être imputées sur l’indemnité réparant l’atteinte à l’intégrité physique de la victime les prestations versées par des tiers payeurs qui ouvrent droit, au profit de ceux-ci, à un recours subrogatoire contre la personne tenue à réparation et que la prestation de compensation du handicap non mentionnée par le premier de ces textes ne donne pas lieu à recours subrogatoire contre la personne tenue à réparation, le moyen est inopérant, dès lors que la prise en compte de la prestation de compensation du handicap n’a eu, en l’espèce, aucune influence sur le montant des indemnités que les tiers responsables et leurs assureurs ont été condamnés à verser à la victime en raison du droit de préférence de la victime sur la dette du tiers responsable ;
D’où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Et attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen annexé, pris en sa seconde branche, qui est irrecevable ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Colette X…, M. Christophe X… et M. Frédéric X… aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du deux juillet deux mille quinze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par Me Haas, avocat aux Conseils, pour Mme Colette X…, M. Christophe X… et M. Frédéric X…
Il est fait grief à l’arrêt attaqué D’AVOIR fixé le préjudice global de Mme X…, après limitation de son droit à indemnisation de 50 %, aux sommes de 653.872,49 euros en capital, une rente trimestrielle de 14.417,50 euros à compter du 1er avril 2014 jusqu’au 31 mars 2018 au titre de l’assistance par une tierce personne, correspondant à un capital annuel, de 57.670 euros et D’AVOIR, au regard de la répartition des responsabilités à concurrence de 70 % pour M. Y… et de 30 % pour M. Z…, condamné in solidum M. Y… et la société Axa France Iard à payer à Mme X… la somme de 457.710,74 euros en capital et une rente trimestrielle de 10.092,25 euros du 1er avril 2014 au 31 mars 2018 et condamné in solidum M. Z… et la société Matmut à payer à Mme X… les sommes de 196.161,75 euros en capital et une rente trimestrielle de 4.325,25 euros du 1er avril 2014 au 31 mars 2018 ;
AUX MOTIFS QUE, sur l’assistance à tierce personne, sa durée est, pour l’aide humaine active, de 6 heures par jours à compter du retour à domicile le 15 juillet 2006 jusqu’au 31 mars 2018, mois du 70ème anniversaire de Mme X…, âge à compter duquel les besoins en dehors de l’accident auraient été de 6 à 8 heures par jour du fait de l’évolution de sa maladie neurologique antérieure, et, pour l’aide humaine passive de surveillance et de présence de 16 heures par jour à compter du retour au domicile ; que, s’agissant de l’assistance à tierce personne échue au 31 mars 2014, elle est, après application de la réduction de 50 % du droit à indemnisation de la victime, de 445.086 euros ; que, par ailleurs, si les sommes versées par le RSI Languedoc-Roussillon au titre de la « majoration tierce personne » doivent être déduites, doivent l’être tout autant celles versées par le conseil général du Gard au titre de la prestation de compensation du handicap qui revête un caractère indemnitaire ; qu’en effet, il s’évince des dispositions des articles L. 245-1 et suivants du code de l’action sociale et des familles, dans sa rédaction issue de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005, que la prestation de compensation du handicap, applicable à compter du 1er janvier 2006, date de son entrée en vigueur, doit être déduite du montant versé à la victime au titre de l’assistance par une tierce personne, ce qu’elle a le même objet, au sens de l’article L. 245-4 du même code et qu’au demeurant, en application de l’article L. 245-7, alinéa 3, du même code, « les sommes versées au titre de cette prestation ne font pas l’objet d’un recouvrement à l’encontre du bénéficiaire lorsque celui-ci est revenu à meilleure fortune » ; qu’un montant mensuel de 1.684,92 euros, correspondant à la prestation de compensation du handicap versée par le conseil général du Gard doit donc être comptabilisé au titre des débours des tiers payeurs, tant pour la période allant au 15 juillet 2006 au 31 mars 2014 que pour la période allant du 1er avril 2014 au 31 mars 2018 ;
ALORS, 1°), QUE, parmi les prestations versées à la victime d’un dommage corporel, seules celles susceptibles de faire l’objet d’un recours subrogatoire contre la personne tenue à réparation ou son assureur, qui sont limitativement énumérées par les articles 29 et 32 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985, doivent être déduites de l’indemnité mise à la charge la personne tenue à réparation ou son assureur ; que la prestation de compensation du handicap, qui incombe au département, ne figure pas au nombre de ces prestations ; que, par suite, en se fondant, de manière inopérante, sur le caractère indemnitaire de cette prestation pour la comptabiliser dans les débours des tiers-payeurs e la déduire de la part à charge pour la victime, la cour d’appel a violé les articles 29 et 32 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985, ensemble l’article L. 245-1 du code de l’action sociale et des familles ;
ALORS, 2°), QUE la réparation du préjudice doit être intégrale, sans qu’il en résulte ni perte ni profit pour la victime ; que la cour d’appel a constaté la nécessité d’une aide humaine passive de surveillance et de présence de 16 heures par jour à compter du retour de Mme X… à son domicile ; qu’en faisant cesser les rentes trimestrielles mises à la charge de MM. Y… et Z… et leurs assureurs au titre de l’assistance à tierce personne au 31 mars 2018, sans avoir constaté, à la différence de l’aide humaine active, que cette aide humaine passive serait de toutes façons devenue nécessaire à compter de cette date du fait de l’évolution de la maladie neurologique antérieure de Mme X…, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision au regard de l’article 1382 du code civil et du principe de la réparation intégrale du préjudice sans perte ni profit pour la victime.
ECLI:FR:CCASS:2015:C201141
Analyse
Publication :
Décision attaquée : Cour d’appel de Montpellier , du 22 avril 2014
Source : légifrance