Avenant n° 6 de la convention des IDE libéraux : nouveau zonage

L’avenant 6 introduit un nouveau zonage grâce à une nouvelle méthode de calcul  : l’accessibilité potentielle localisée (APL).

 

L’avenant précise la nouvelle classification des zones, à savoir les zones : surdotées, très dotées, intermédiaires, sous-dotées et très sous dotées.

Au regard des difficultés d’accès aux soins des patients dans certaines zones, des mesures ont été prises afin d’inciter les infirmiers à se répartir de manière plus équilibrée sur le territoire et surtout à s’installer dans des zones très sous dotées.

 

  1. Dans les zones très sous dotées, trois contrats incitatifs vont être créés.

Pour chacun de ces contrats, il est prévu que l’infirmier bénéficie d’une rémunération supplémentaire de 150 euros par mois s’il s’est engagé à accueillir un étudiant infirmier stagiaire à temps plein. Cette rémunération sera versée pendant la durée du stage.

Il sera mis fin à la possibilité de conclure les contrats incitatifs prévus dans les avenants 3 et 5 à compter de la date d’entrée en vigueur du nouveau zonage. Les contrats en cours perdureront en principe jusqu’à leur arrivée à échéance.

  • Contrat d’aide à l’installation

Ce contrat sera mis en place pour une durée de cinq ans non renouvelable et permettra d’obtenir une aide forfaitaire de 27 500 euros maximum.

En retour l’infirmier s’engagera notamment à exercer pendant cinq ans au moins dans une zone très sous-dotée, à réaliser une activité libérale à hauteur de 50 % au sein de cette zone et à exercer son activité en groupe.

  • Contrat d’aide à la première installation

Ce contrat, qui ne concernera que la première installation en libéral, sera également mis en place pour une durée de 5 ans non renouvelable.

Il permettra d’obtenir une aide forfaitaire de 37 500 € au maximum en échange des engagements de la part de l’infirmier tel que susvisés.

  • Contrat d’aide au maintien

Ce contrat a pour objectif de favoriser le maintien des infirmiers libéraux dans les zones très sous-dotées.

Il sera mis en place pour une durée de 3 ans renouvelables et permettra à l’infirmier d’obtenir 3 000 € par an.

Les obligations de l’infirmier seront les mêmes que pour les autres contrats.

 

2. Dans les zones surdotées, seul le successeur de l’infirmier pourra se voir attribuer la place vacante d’un infirmier qui cesse son activité. A défaut, ladite place disparaîtra.

 

3. Dans les zones très dotées et intermédiaires situées en périphérie d’une zone surdotée, l’infirmier devra exercer au moins deux tiers de son activité dans sa zone d’installation.

Autrement dit, il ne pourra pas exercer plus d’un tiers de son activité dans une zone surdotée.

 

Mots-clés : zonage, contrat d’aide à l’installation, contrat d’aide au maintien, contrat d’aide à la première installation, zone surdotée, zone très sous dotée, zone intermédiaire, zone très dotée, aide financière, accessibilité potentielle localisée.

Point informations et échanges du 5 décembre 2019: le dossier de soins infirmiers en libéral

Retour sur le point information et échanges du 5 décembre 2019 sur le dossier de soins infirmiers en libéral. Le powerpoint qui a servi de support est accessible en cliquant ci-dessous.

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Les pertes de gains professionnels : distinctes de l’incidence professionnelle

 

La Cour de cassation, dans un arrêt du 23 mai 2019, rappelle que les pertes de gains professionnels peuvent constituer un préjudice distinct de l’incidence professionnelle.

Leurs indemnisations respectives peuvent donc se cumuler.

En l’espèce il s’agissait d’une personne victime d’un accident de la route alors qu’il conduisait une moto. Une transaction avait eu lieu quant à l’indemnisation de l’accident initial. La victime avait assigné l’assureur pour une aggravation de son préjudice.

La Cour d’appel d’Angers l’avait indemnisé de ses pertes de gains professionnels par la somme de 103 464 € et celle de 40 000 € au titre de l’incidence professionnelle.

L”assureur, la GMF, contestait ainsi la décision : l’incidence professionnelle répare la dévalorisation sur le marché du travail, la pénibilité, le fait d’abandonner son emploi pour un autre. Ceci exclut le fait de ne pouvoir retravailler.

En indemnisant la perte de gains futurs et l’incidence professionnelle, la Cour d’appel indemnisait deux fois le même préjudice.

Pour la Cour de cassation, compte tenu des restrictions importantes subies par la victime, le retour à l’emploi était très aléatoire. Aussi, réparer la perte de gains futurs et la perte de chance d’une promotion professionnelle n’étaient pas incompatibles car indemnisant deux postes distincts de préjudice.

Cour de cassation, chambre civile 2, 22 mai 2019, pourvoi n° 18-17560

Point information et échanges du 27 juin 2019 : l’infirmière face aux répétitions d’indu et autres procédures

Retour sur le point information et échanges du 27 juin 2019 sur l’infirmière face aux répétitions d’indu et autres procédures. Le powerpoint qui a servi de support est accessible en cliquant ci-dessous.

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Point information et échanges du 7 mars 2019 : la responsabilité de l’infirmière

Retour sur le point information et échanges du 7 mars 2019 sur la responsabilité de l’infirmière. Le powerpoint qui a servi de support est accessible en cliquant ci-dessous.

La responsabilité de l’infirmier(e)

Indemnisation des accidents médicaux : un mécanisme dévoyé

La Cour des comptes vient de rendre son rapport.

Il égratigne sérieusement la mise en oeuvre du dispositif d’indemnisation des accidents médicaux au coeur duquel figure l’acteur incontournable qu’est l’ONIAM.

Le rapport rappelle la naissance du mécanisme né de la loi du 4 mars 2002 : l’absence de prise en compte de l’aléa thérapeutique par les tribunaux. Si la loi de 2002 réaffirme la nécessité d’une faute pour engager la responsabilité d’un professionnel de santé, elle a prévu un dispositif visant à réparer gratuitement et rapidement les victimes d’accidents médicaux non fautifs (aléas thérapeutiques) présentant tune certaine gravité, en l’espèce 25 % d’atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique et un dommage anormal au regard de l’état initial du patient et son évolution prévisible.

 

1. La procédure d’indemnisation

La procédure a été voulue simple pour être accessible à tous et les victimes sont représentées à travers des associations.

Après avoir déposé sa demande à une CCI (Commission de Conciliation et d’Indemnisation, 23 sur le territoire), la victime est examinée par un expert ou un collège d’experts, inscrit(s) sur une liste nationale et dont les honoraires sont pris en charge par l’ONIAM (Office National d’indemnisation des accidents médicaux).

Les experts doivent être issus de la liste de la Commission nationale des accidents médicaux (CNAMed) qui doit évalué les connaissances des experts et établir pour la Parlement chauqe année une évaluation du dispositif

Suite au dépôt du rapport et après avoir entendu la victime, la CCI rend un avis sur la cause des dommages et leur étendue. Si la responsabilité est fautive elle invite l’assurances du professionnels de santé à faire une offre à la victime et s’il s’agit d’un aléa thérapeutique, l’ONIAM doit formuler une offre. Si l’assureur ne propose pas d’offre, la victime peut demander à l’ONIAM de se substituer à l’assureur.

Le mécanisme prévoit des délais imposant aux acteurs du dispositif d’agir avec célérité. Le fait que l’ONIAM soit un établissement public garantit les fonds et la bonne exécution des avis rendus par les CCI.

Au fil du temps l’ONIAM a été chargé de la réparation des dommages résultant d’une vaccination obligatoire, contamination par VIH, hépatite B et C, accidents dus à l’usage du Benfluorex (Médiator), avec un mécanisme différent de celui pour les accidents médicaux non fautifs.

 

2. Une “dérive de l’équilibre institutionnel initial”

C’est ainsi que la Cour des comptes évalue le dispositif après 15 années d’existence de la loi.

a. Cette dérive se manifeste tout d’abord par la remise en cause par l’ONIAM de l’indépendance des CCI

La loi avait confié la présidence des CCI à des magistrats afin de garantir l’impartialité, l’indépendance, éviter les conflits d’intérêts… L’ONIAM quant à lui se voyait assumer les frais de fonctionnement et mettre à disposition des CCI le personnel nécessaire.

Or l’affectation des moyens faite par l’ONIAM aux différentes CCI se fait de façon discrétionnaire, sans linge budgétaire et la Cour des comptes relève que “la pertinence de leur répartition n’est pas avérée“. Ainsi en Ile-de-France les agents traitent en moyenne 133 dossiers contre 98 à NANCY, soit 44 % de dossiers en moins.

Mais surtout les Présidents de CCI n’ont aucun pouvoir hiérarchique sur les agents que l’ONIAM met à la disposition des Commissions et ces dernières sont totalement dépendantes de l’ONIAM pour l’allocation de leurs crédits de fonctionnement.

Alors que cela n’était pas prévu par le législateur, l’ONIAM conteste régulièrement le bien-fondé des avis rendus par les CCI.

Si l’ONIAM doit calculer l’offre d’indemnisation, veiller à ce que les pièces justificatives soient bien au complet, il n’a cessé de vouloir étendre son rôle. Grâce à une jurisprudence du Conseil d’Etat du 10 octobre 2007 convergente avec la Cour de cassation  (Cass, Civ 1ère, 6 mai 2010 et 4 mai 2012) selon quoi l’avis de la CCI ne lie pas l’ONIAM, ce dernier s’est octroyé le droit de réexaminer les avis de la CCI au point de les modifier dans un sens radicalement différent.

Pourtant l’ONIAM siège au sein des CCI et est présent lors des délibérations. Non seulement il réexamine les dossiers, en secret et selon une procédure non contradictoire mais de plus il informe les victimes de ses points de divergence avec la CCI qui a rendu l’avis et et parfois m^me la recevabilité du dossier alors que la loi est claire confiant cette tâche à la CCI et non à l’ONIAM.

L’Office peut ainsi conclure à un refus d’indemniser et ceci sur l’évaluation faite par son service médical (1 médecin généraliste, deux internes et un chirurgien à mi-temps) composé de praticiens qui ne sont pas agréé par la CNAMed. La Cour note que ce nouvel examen peut prendre jusqu’à 6 mois et est pratiqué en violation de la loi puisque cette dernière n’a confié aucune attribution d’ordre médical à l’Office.

La Cour note que “l’établissement (l’ONIAM) intervient ainsi comme un assureur qui s’attacherait à limiter sa charge de sinistre“.

b. Elle se traduit également par l’effacement de la CNAMed

Le nombre d’experts inscrits sur la liste de la CNAMed n’est pas suffisant pour satisfaire la demande. Le nombre a même baissé (247 médecins en 2011 et 200 et 2015). Ceci pousse les CCI à confier des expertises à des experts médicaux non inscrits.

Pire : une ordonnance du 15 juillet 2016 a supprimé la condition préalable pour l’inscription sur la liste de la CNAMed d’être expert judiciaire.

D’autre part la CNAMed ne remplit pas son obligation d’évaluation annuelle du dispositif.

Cet effacement n’a pas été négatif pour tout le monde puisqu’il a permis à l’ONIAM d’élargir encore son domaine d’intervention encore une fois au delà de ce que lui autorise la loi et impose ses vues sur les dossiers en amont.

Ainsi l’Office a organisé des groupes de travail sans y associer la CNAMed ni les associations de victimes sur des sujets comme l’indemnisation de l’aide humaine et a négocié en 2013 une protocole d’accord avec la fédération des spécialités médicales pour trouver des experts alors que cela ne relève pas de ses attributions mais de la CNAMed. L’ONIAM a pu agir avec d’autant plus de facilité que la CNAMed n’a plus fonctionné pendant 8 mois en 2015 pour cause de non renouvellement de ses membres en temps utile par les autorités!!

Pour la Cour des comptes le dispositif prévu par la loi de 2002 portait en soi dès le départ un déséquilibre en ne prévoyant pas pour les CCI et la CNAMed de moyens propres.

Prévu pour être attentif aux préoccupations des victimes et plus proche des victimes qu’un contentieux classique, le mécanisme s’est totalement enrayé et a été dévoyé dans sa mise en oeuvre.

3. Des résultats pour la Cour des comptes très éloignés des objectifs

Pour la Cour le dispositif est en échec

Il est en effet peu attractif et peu performant.

Les demandes n’ont jamais dépassé les 4500 dossiers par an et ont même baissé en 2015 de 3, 6 %.

Les CCI ont rejeté 3/4 des dossiers au regard de la gravité jugée insuffisante. Sur la période 2011-2015, 5646 avis favorables ont été émis par les CCI, dont 2663 pour des accidents fautifs.

L’ONIAM a, à son tour, réexaminé les dossiers et écarté à nouveau 8, 5 % des dossiers : 5 % pour des avis portant sur une demande au titre d’un aléa thérapeutique et 20 % de ceux relatifs à des demandes de substitution en cas d’accidents fautifs.

Résultat : les saisines directes des tribunaux ont bondi de 9 % en 2011 à 16% en 2015! En 2011, 11 % des victimes contestaient les décisions de l’ONIAM, elles étaient 17 % en 2015. La Cour note que près de la moitié des indemnisations réglées par l’ONIAM le sont en vertu d’une décision d’un tribunal.

Enfin le bilan du dispositif est peu flatteur pour l’ONIAM qui se félicite pourtant de réduire les délais d’indemnisation.

Ces délais s’allongent et le délai légal de 4 mois n’est jamais respecté. Seuls 13 % des avis sont suivis d’indemnisation en 1 an.

Pire, dans la mesure où l’ONIAM peut faire une offre partielle, c’est à dire indemniser par exemple 2 ou 3 préjudices, l’Office utilise ce moyen pour respecter purement formellement le délai de 4 mois car l’offre définitive, c’est à dire incluant l’absence des préjudices, peut prendre parfois plusieurs années, en particulier quand la victime, sans avocat, ne produit pas les pièces relatives aux indemnités qu’elle a reçues des tiers payeurs (les organismes sociaux comme les CPAM).

Au bout de plusieurs années l’ONIAM clôt administrativement le dossier.

La Cour relève ainsi que 58 % des dossiers enregistrés en 2011 n’avaient reçu au 31 mars 2016 qu’une offre partielle !!

Enfin pour les dossiers ayant finalement abouti, le délai moyen s’établir maintenant à environ 2 ans et 9 mois, encore que ce délai ne court qu’à partir du moment où le dossier de la vicitime est considéré comme complet, ce qui peut prendre déjà 6 mois.

La comparaison des délais avec les tribunaux, administratifs comme judiciaires,  n’est pas spécialement à l’avantage du dispositif car les délais sont assez proches pour les juridictions administratives, voire plus rapides pour les juridictions judiciaires.

Quant au niveau des indemnisations, la comparaison est difficile à faire note la Cour car l’ONIAM ne donne des informations que sur le montant moyen des indemnisations par dossier clos. Or ce taux stagne depuis 2008, voire à tendance à baisser.

Si l’ONIAM explique que cet niveau est dû au référentiel utilisé qui est moins avantageux que celui des tribanux, la Cour note que cela ne vaut que pour les juridictions judiciaires puisque les tribunaux administratifs ont tendance à prendre comme référentiel celui de l’ONIAM.

Il faudra espérer que la revalorisation du référentiel en 2016 profite aux victimes.

Pour la Cour le dispositif amiable d’indemnisation des victimes d’accidents médiaux ne se révèle pas plus avantageux aujourd’hui pour une victime que le contentieux classique devant les tribunaux.

 

4. Enfin la Cour note de nombreuses et graves défaillances de gestion

qui doit appeler à une remise en ordre impérative du dispositif

 

Pour la Cour ces graves défaillances sont d’autant plus anormales que l’ONIAM a pris la direction du système d’indemnisation : un budget sous-exécuté, des charges de personnel ayant fortement augmenté et une commande publique sans pilotage. Les marchés, du plus petit au plus important, présentent des irrégularité au regard du Code des marchés publics a relevé la Cour.

Ces dysfonctionnement s’accompagnent de l’absence d’assistance des victimes, hormis celles assistées d’un avocat et/ou d’un médecin-conseil ou d’une association de victimes.

Les victimes sont contraintes de faire de longs voyages pour les expertises et à leur frais.

Devant la réticence des établissements et des professionnels de santé, la Cour propose l’instauration d’une amende qui viendrait sanctionner la non communication des dossiers médicaux.

En ce qui concerne la pénurie d’experts, les Présidents de CCI pourraient faire appel à des médecins non inscrits mais leur mission ouvrirait une période probatoire de 1 ou 2 ans au terme de laquelle il y aurait agrément de la CNAMed pour continuer.

Pour la Cour il est tout aussi important de clarifier le rôle des CCI, de la CNAMed et de l’ONIAM.

La première mesure essentielle consistant dans l’arrêt par l’ONIAM du réexamen des avis de la CCI note la Cour.

On pourrait ajouter également l’existence d’un budget propre ne faisant pas dépendre pour leur fonctionnement les CCI de l’Office.

Le 1er Ministre a déclaré récemment que le gouvernement était mobilisé pour réformer l’ONIAM.

Son directeur actuel, Erik RANCE, devrait être remplacé par Sebastien LELOUP, actuellement directeur délégué auprès de la Direction générale de la Haute Autorité de santé (HAS).

Pour lire le rapport

réunion

Responsabilité et Impartialité des experts

council-of-state-535721_1280Le Conseil d’Etat a rendu le 18 mars 2015 un arrêt sur un contentieux assez rare : la responsabilité des experts. La rareté des arrêts provient toutefois plus de la renonciation des justiciables à les assigner devant le coût de la procédure s’ajoutant au coût généré par la procédure initiale qui a amené leur nomination qu’à la qualité exceptionnelle des expertises.

Ce qui fait l’originalité du cas d’espèce repose sur le fait que le justiciable avait saisi les autorités disciplinaires du médecin expert en raison du délai, trop long pour le demandeur, mis à déposer son rapport. En l’espèce, l’expert désigné en juillet 2007, n’avait convoqué les parties qu’en février 2008. Saisi le Conseil de l’Ordre avait prononcé un blâme alors que le magistrat chargé des expertises avait prononcé la caducité de sa nomination et désigné un nouvel expert.

Le justiciable avait saisi sur le fondement de l’article R. 4127-31 du Code de la santé publique qui dispose qu’un médecin doit s’abstenir de tout acte de nature à déconsidérer sa profession. Fondement comme le voit plutôt large. Le médecin avait saisi le Conseil d’Etat d’un pourvoi. Le Conseil d’Etat rejeta le pourvoi, sanctionnant par là l’ensemble des experts qui ne respectent pas les délai sans se justifier.

Conseil d’État 

N° 373158    
ECLI:FR:CESSR:2015:373158.20150318 
Mentionné dans les tables du recueil Lebon 
4ème / 5ème SSR
Mme Florence Chaltiel-Terral, rapporteur
Mme Maud Vialettes, rapporteur public
SCP RICHARD ; SCP BARTHELEMY, MATUCHANSKY, VEXLIARD, POUPOT, avocats

Pour lire la suite

lecture du mercredi 18 mars 2015

REPUBLIQUE FRANCAISEAU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

 


 

Texte intégral

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 6 novembre 2013 et 6 février 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour M. B…A…, demeurant au …; M. A…demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler la décision n° 11452 du 6 septembre 2013 par laquelle la chambre disciplinaire nationale de l’ordre des médecins, réformant la décision n° 10.36.1581 du 20 septembre 2011 de la chambre disciplinaire de première instance des Pays de la Loire, statuant sur la plainte du conseil départemental de l’ordre des médecins de Loire-Atlantique lui ayant infligé un blâme, lui a infligé un avertissement ; 

2°) de mettre à la charge du conseil départemental de l’ordre des médecins de Loire-Atlantique la somme de 3 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ; 

Vu la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

– le rapport de Mme Florence Chaltiel-Terral, maître des requêtes en service extraordinaire, 

– les conclusions de Mme Maud Vialettes, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Richard, avocat de M. A…et à la SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard, Poupot, avocat du Conseil national de l’ordre des médecins ;

1. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, dans le cadre d’un litige dont était saisi le tribunal de grande instance de Saint-Nazaire, le président de ce tribunal, a, par une ordonnance du 3 juillet 2007, ordonné une expertise sur l’état de santé de M. S. et désigné M.A…, médecin spécialisé en psychiatrie, pour réaliser cette expertise ; que, par une ordonnance en date du 1er juillet 2008, le magistrat chargé du suivi de l’expertise a, en raison du manque de diligence de M. A…dans l’exercice de sa mission d’expertise, prononcé la caducité de sa désignation et nommé un nouvel expert ; que, saisi par M. S. d’une plainte contre M. A…à raison de ces faits, le conseil départemental a, par une décision du 2 septembre 2010, engagé une procédure disciplinaire à l’encontre de l’intéressé ; que par une décision du 20 septembre 2011, la chambre disciplinaire de première instance des Pays de la Loire a infligé à M. A…un blâme ; que M. A…se pourvoit en cassation contre la décision du 6 septembre 2013 par laquelle la chambre disciplinaire nationale de l’ordre des médecins lui a infligé un avertissement ; 

2. Considérant, en premier lieu, qu’aux termes de l’article L. 4124-2 du code de la santé publique, dans sa version en vigueur à la date des faits litigieux : ” Les médecins, les chirurgiens-dentistes ou les sages-femmes chargés d’un service public et inscrits au tableau de l’ordre ne peuvent être traduits devant la chambre disciplinaire de première instance, à l’occasion des actes de leur fonction publique, que par le ministre chargé de la santé, le représentant de l’Etat dans le département, le procureur de la République ou, lorsque lesdits actes ont été réalisés dans un établissement public de santé, le directeur de l’agence régionale de l’hospitalisation ” ; que l’article 62 de la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, entré en vigueur le 23 juillet 2009, a modifié ces dispositions pour remplacer, parmi les autorités ayant qualité pour saisir le juge disciplinaire, le directeur de l’agence régionale de l’hospitalisation par le directeur de l’agence régionale de santé, et pour y ajouter le Conseil national de l’ordre des médecins et le conseil départemental au tableau duquel le praticien est inscrit ; 

3. Considérant que si, en matière d’édiction de sanction administrative, sont seuls punissables les fais constitutifs d’un manquement à des obligations définies par des dispositions législatives ou réglementaires en vigueur à la date où ces faits ont été commis, en revanche, et réserve faite du cas où il en serait disposé autrement, s’appliquent immédiatement les textes fixant les modalités des poursuites et les formes de la procédure à suivre, alors même qu’ils ouvrent une possibilité de réprimer des manquements commis avant leur entrée en vigueur ; que les dispositions rappelées ci-dessus de l’article 62 de la loi du 21 juillet 2009, qui désignent de nouvelles autorités ayant compétence pour saisir le juge disciplinaire, sont immédiatement applicables indépendamment de la date des faits faisant objet de la poursuite ; qu’est à cet égard sans incidence la circonstance que ces faits auraient été commis par un praticien chargé d’un service public dans l’exercice de sa fonction publique ; 

4. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que, contrairement à ce que soutient M.A…, la chambre disciplinaire nationale n’a pas commis d’erreur de droit en jugeant que le conseil départemental était compétent pour engager une procédure disciplinaire à son encontre, alors même que les actes qui faisaient l’objet de la poursuite avaient été accomplis avant l’entrée en vigueur de l’article 62 de la loi du 21 juillet 2009 ; 

5. Considérant, en deuxième lieu, qu’il ressort des énonciations de la décision attaquée que la chambre disciplinaire nationale a retenu qu’avant d’engager des poursuites le conseil départemental de Loire-Atlantique, auteur de la plainte, s’était borné à manifester l’intention de prendre une décision de classement sans suite ; que par suite, le moyen tiré de ce que la chambre disciplinaire nationale aurait commis une erreur de droit en jugeant que des poursuites pouvaient être régulièrement engagées après une décision de classement sans suite est inopérant ;

6. Considérant, enfin, qu’en vertu de l’article R. 4127-31 du code de la santé publique, le médecin doit s’abstenir de tout acte de nature à déconsidérer la profession ; que la chambre disciplinaire a notamment retenu que M.A…, désigné le 3 juillet 2007 en qualité d’expert judiciaire, n’a organisé sa première mission d’expertise que le 15 février 2008 et n’avait pas remis de rapport le 1er juillet 2008, date à laquelle le magistrat chargé du suivi des expertises a prononcé la caducité de sa désignation et nommé un autre expert ; qu’en jugeant, par une décision suffisamment motivée sur ce point, que ces faits étaient constitutifs d’un manque de diligence de nature à déconsidérer la profession de médecin et, par suite, fautifs, la chambre disciplinaire nationale n’a pas inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis et n’a pas commis d’erreur de droit ; 

7. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi de M. A…doit être rejeté ;

8. Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu’une somme soit mise à ce titre à la charge du conseil départemental de l’ordre des médecins de Loire-Atlantique, qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante ; 

D E C I D E :
————–
Article 1er : Le pourvoi de M. A…est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. B…A…et au Conseil national de l’ordre des médecins. 
Copie en sera adressée pour information au conseil départemental de l’ordre des médecins de Loire-Atlantique.


 

Analyse

Abstrats : 54-07-06 PROCÉDURE. POUVOIRS ET DEVOIRS DU JUGE. POUVOIRS DU JUGE DISCIPLINAIRE. – ENGAGEMENT DES POURSUITES DISCIPLINAIRES – DISCIPLINE DES PROFESSIONS DE SANTÉ – MODIFICATION DES AUTORITÉS POUVANT ENGAGER LES POURSUITES – LOI DE PROCÉDURE IMMÉDIATEMENT APPLICABLE, Y COMPRIS POUR LES FAITS ANTÉRIEURS À CETTE MODIFICATION. 
55-04-01-01 PROFESSIONS, CHARGES ET OFFICES. DISCIPLINE PROFESSIONNELLE. PROCÉDURE DEVANT LES JURIDICTIONS ORDINALES. INTRODUCTION DE L’INSTANCE. – DISCIPLINE DES PROFESSIONS DE SANTÉ – MODIFICATION DES AUTORITÉS POUVANT ENGAGER LES POURSUITES – LOI DE PROCÉDURE IMMÉDIATEMENT APPLICABLE, Y COMPRIS POUR LES FAITS ANTÉRIEURS À CETTE MODIFICATION. 
59-02-02-01 RÉPRESSION. DOMAINE DE LA RÉPRESSION ADMINISTRATIVE RÉGIME DE LA SANCTION ADMINISTRATIVE. AUTORITÉS ADMINISTRATIVES TITULAIRES DU POUVOIR DE SANCTION. – MODIFICATION DES AUTORITÉS HABILITÉS À ENGAGER DES POURSUITES DISCIPLINAIRES – LOI DE PROCÉDURE IMMÉDIATEMENT APPLICABLE, Y COMPRIS POUR LES FAITS ANTÉRIEURS À CETTE MODIFICATION. 

Résumé : 54-07-06 L’article 62 de la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 a prévu que les poursuites disciplinaires contre un médecin chargé d’un service public pourraient désormais être engagées, non seulement par les autorités de l’Etat prévues antérieurement, mais aussi par le Conseil national de l’ordre des médecins et le conseil départemental au tableau duquel le praticien est inscrit…. ,,Si, en matière d’édiction de sanction administrative, sont seuls punissables les fais constitutifs d’un manquement à des obligations définies par des dispositions législatives ou réglementaires en vigueur à la date où ces faits ont été commis, en revanche, et réserve faite du cas où il en serait disposé autrement, s’appliquent immédiatement les textes fixant les modalités des poursuites et les formes de la procédure à suivre, alors même qu’ils ouvrent une possibilité de réprimer des manquements commis avant leur entrée en vigueur [RJ1]. Les dispositions de l’article 62 de la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009, qui désignent de nouvelles autorités ayant compétence pour saisir le juge disciplinaire, sont immédiatement applicables indépendamment de la date des faits faisant objet de la poursuite.
55-04-01-01 L’article 62 de la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 a prévu que les poursuites disciplinaires contre un médecin chargé d’un service public pourraient désormais être engagées, non seulement par les autorités de l’Etat prévues antérieurement, mais aussi par le Conseil national de l’ordre des médecins et le conseil départemental au tableau duquel le praticien est inscrit…. ,,Si, en matière d’édiction de sanction administrative, sont seuls punissables les fais constitutifs d’un manquement à des obligations définies par des dispositions législatives ou réglementaires en vigueur à la date où ces faits ont été commis, en revanche, et réserve faite du cas où il en serait disposé autrement, s’appliquent immédiatement les textes fixant les modalités des poursuites et les formes de la procédure à suivre, alors même qu’ils ouvrent une possibilité de réprimer des manquements commis avant leur entrée en vigueur. Les dispositions de l’article 62 de la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009, qui désignent de nouvelles autorités ayant compétence pour saisir le juge disciplinaire, sont immédiatement applicables indépendamment de la date des faits faisant objet de la poursuite.
59-02-02-01 L’article 62 de la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 a prévu que les poursuites disciplinaires contre un médecin chargé d’un service public pourraient désormais être engagées, non seulement par les autorités de l’Etat prévues antérieurement, mais aussi par le Conseil national de l’ordre des médecins et le conseil départemental au tableau duquel le praticien est inscrit…. ,,Si, en matière d’édiction de sanction administrative, sont seuls punissables les fais constitutifs d’un manquement à des obligations définies par des dispositions législatives ou réglementaires en vigueur à la date où ces faits ont été commis, en revanche, et réserve faite du cas où il en serait disposé autrement, s’appliquent immédiatement les textes fixant les modalités des poursuites et les formes de la procédure à suivre, alors même qu’ils ouvrent une possibilité de réprimer des manquements commis avant leur entrée en vigueur. Les dispositions de l’article 62 de la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009, qui désignent de nouvelles autorités ayant compétence pour saisir le juge disciplinaire, sont immédiatement applicables indépendamment de la date des faits faisant objet de la poursuite.

[RJ1]Cf. CE, Section, 17 novembre 2006, CNP Assurances, n° 276926, p. 473.

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Source : Légifrance

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Amiante: délai de prescription du préjudice d’anxiété

Les victimes de l’amiante sollicitent leur indemnisation généralement plusieurs années après leur départ de l’entreprise.

Se pose alors la problématique de la prescription de leur action.

Dans cet arrêt portant sur la réparation du préjudice d’anxiété subi par des salariés exposés à l’amiante, la Cour de cassation est venue préciser ce délai.

La Cour d’appel d’Aix en Provence avait rejeté les demandes des salariés au motif que “les demandes des salariés, compte tenu de la date de rupture des contrats de travail et de celle de la saisine de la juridiction prud’homale, resteraient néanmoins irrecevables par l’effet de la prescription, plus de trente ans s’étant écoulés entre ces deux dates.

Dans son arrêt du 19 novembre 2014 la Chambre sociale a rappelé que “les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer“.

Elle a ajouté que, les salariés n’ont eu connaissance du risque à l’origine de l’anxiété qu’à compter de l’arrêté ministériel ayant inscrit leur activité (en l’espèce une activité de réparation et de construction navale) sur la liste des bénéficiaires de l’ACAATA (Allocation de Cessation Anticipée d’Activité des Travailleurs de l’Amiante).

Dès lors, le délai de prescription quinquennal court au jour de l’arrêté ministériel, qui constitue le jour à compter duquel les salariés ont eu connaissance du risque pour leur santé que présentait leur activité professionnelle.

Cass. soc., 19 novembre 2014 -n° 13-19263

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n° H 13-19.263 à T 13-29.273 ;

Attendu, selon les arrêts attaqués, que M. X… et dix autres salariés ont été employés sur le site de La Ciotat, sur des périodes allant de novembre 1965 à décembre 1978, par la société des Chantiers navals de La Ciotat (CNC) dont l’activité chantiers navals a été reprise le 3 novembre 1982 par la société les Chantiers du Nord et de la Méditerranée (ci-après Normed), nouveau nom de la société de Participations et de constructions navales ( SPCN) dans le cadre d’une cession partielle d’actif, l’apport étant placé sous le régime juridique des scissions ; que la Normed a été mise en redressement judiciaire le 30 juin 1986, puis en liquidation judiciaire le 27 février 1989 ; que par arrêté du 7 juillet 2000, l’activité de réparation et de construction navale de la Normed a été inscrite sur la liste des établissements permettant la mise en oeuvre de l’allocation de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante (ACAATA) au profit des salariés concernés pour la période comprise entre 1946 et 1989 ; que les salariés ont saisi la juridiction prud’homale le 19 septembre 2011 d’une demande en réparation de leur préjudice d’anxiété et de bouleversement dans les conditions d’existence à l’encontre du liquidateur de la Normed et de l’AGS-CGEA ;

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Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :

Vu les articles L. 236-3, L. 236-20 et L. 236-22 du code de commerce ;

Attendu qu’il résulte de ces textes que sauf dérogation expresse prévue par les parties dans le traité d’apport, l’apport partiel d’actif emporte lorsqu’il est placé sous le régime des scissions, transmission universelle de la société apporteuse à la société bénéficiaire de tous les biens, droits et obligations dépendant de la branche d’activité qui fait l’objet de l’apport ;

Attendu que pour déclarer les salariés irrecevables en leurs demandes, les arrêts retiennent qu’il résulte de l’article 11 du traité d’apport partiel d’actif que la SPCN, devenue la Normed a repris sans recours contre la société apporteuse les obligations contractées par cette dernière en application des seuls contrats de travail transférés dans les conditions prévues aux articles L. 122-12 et L. 132-7 du code du travail ; que les salariés ayant cessé leur activité antérieurement à 1982 n’ont jamais été salariés de la société Normed et que celle-ci n’a pas repris les obligations contractées par le précédent employeur dont les contrats de travail ne lui ont pas été transférés ;

Qu’en statuant ainsi par des motifs inopérants tirés du transfert légal des contrats de travail en cours, sans qu’il résulte de ses constatations que l’obligation était étrangère à la branche d’activité apportée ou expressément exclue par le traité d’apport, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

Et sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :

Vu l’article 2262 du code civil dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, l’article 26-II de cette même loi et l’article 2224 du code civil ;

Attendu que les arrêts retiennent qu’en admettant que la Normed soit tenue de répondre des contrats de travail rompus antérieurement à 1982, les demandes des salariés, compte tenu de la date de rupture des contrats de travail et de celle de la saisine de la juridiction prud’homale, resteraient néanmoins irrecevables par l’effet de la prescription, plus de trente ans s’étant écoulés entre ces deux dates ;

Attendu cependant que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer ;

Qu’en statuant comme elle l’a fait, alors que les salariés, bénéficiaires de l’ACAATA, avaient eu connaissance du risque à l’origine de l’anxiété à compter de l’arrêté ministériel ayant inscrit l’activité de réparation et de construction navale de la Normed sur la liste des établissements permettant la mise en oeuvre de ce régime légal spécifique, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu’ils rejettent l’exception d’incompétence, les arrêts rendus le 11 avril 2013, entre les parties, par la cour d’appel d’Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence, autrement composée ;

Condamne la société MJA, prise en la personne de Mme Y… ès qualités de mandataire judiciaire de la société Normed, aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne la société MJA, prise en la personne de Mme Y…, ès qualités, à payer aux salariés la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts partiellement cassés ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf novembre deux mille quatorze.


MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour M. X… et les dix autres demandeurs aux pourvois n° H 13-19.263 à T 13-29.273

Le moyen fait grief aux arrêts attaqués d’AVOIR déclaré irrecevables les demandes des salariés tendant à ce que soient fixées au passif de la liquidation judiciaire de la société LA NORMED des créances de dommages et intérêts en réparation du préjudice d’anxiété et du préjudice lié au bouleversement dans les conditions d’existence et à ce que les arrêts soient déclarés opposables à l’AGS-CGEA ;

AUX MOTIFS QUE il résulte de l’article 11 du traité d’apport partiel d’actif que la SPCN (devenue LA NORMED) avait repris, sans recours contre la société apporteuse, les obligations contractées par cette dernière pour les seuls contrats de travail transférés à la SPCN (devenue LA NORMED) dans les conditions prévues aux articles L. 122-12 et L. 132-7 du code du travail alors applicables ; que les certificats de travail produits aux débats démontrent que les contrats de travail avaient définitivement pris fin entre 1969 et 1978 ; que dans ces conditions, LA NORMED n’avait pas pu poursuivre le contrat de travail rompu antérieurement à la reprise par elle de l’activité de la société CNC ; que les demandes dirigées contre LA NORMED s’avèrent dès lors irrecevables, cette dernière n’ayant jamais été l’employeur de cette dernière ; qu’au demeurant, en admettant que LA NORMED serait tenue, même en l’absence de clause de garantie du passif, de répondre des contrats de travail rompus antérieurement à 1982, il en résulterait, compte tenu, de la date de la rupture des contrats de travail et de celle de la saisine du conseil de prud’hommes, que les demandes dirigées contre LA NORMED resteraient néanmoins irrecevables par l’effet de la prescription, plus de trente ans s’étant écoulés entre ces deux dates ;

1/ ALORS QUE sauf dérogation expresse prévue par les parties dans le traité de scission ou d’apport, en cas d’apport partiel d’actif placé sous le régime des scissions, la transmission universelle des biens, droits et obligations rattachés à la branche d’activité apporté s’opère de plein droit, quand bien même, par suite d’une erreur, d’un oubli ou de toute autre cause, le bien, droit ou obligation ne figurerait pas dans le traité d’apport ; qu’en refusant de considérer que les obligations nées des contrats de travail conclus avec la société CNC et rompus avant la date de l’apport d’actif avaient été transmises de plein droit à la société SPCN, la cour d’appel a violé l’article L. 236-3 du code de commerce, ensemble l’article 1134 du code civil ;

2/ ALORS QUE, à tout le moins, en retenant que l’article 11, alinéa 1er, du traité d’apport partiel d’actif avait limité la transmission à la société bénéficiaire des droits et obligations nés des contrats de travail en cours à la date de réalisation de l’apport, quand cette clause n’était que le rappel de l’article L. 122-12, alinéa 2, du code du travail alors applicable et le principe de transmission universelle de l’actif et du passif se rattachant à la division navale apportée était stipulé à l’article 1er du paragraphe II, la cour d’appel a dénaturé le sens clair et précis du traité d’apport partiel d’actif signé le 3 novembre 1982 ;

3/ ALORS QUE, enfin, que le délai de prescription d’une action en responsabilité contractuelle ne court qu’à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu’elle n’en avait pas eu précédemment connaissance ; qu’en retenant comme point de départ de ce délai la date de rupture du contrat de travail des salariés qui ne peut correspondre à la date à laquelle s’est réalisé le préjudice des salariés née d’une situation d’inquiétude permanente de développer une maladie liée à l’amiante, la cour d’appel a violé l’article 2262 du code civil.

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