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Expertise dans le cadre d’une infection nosocomiale

Une victime d’un accident domestique a été admise dans un hôpital lyonnais en août 2011.

Quelques mois plus tard, une biopsie confirme que le patient est atteint d’une infection nécessitant l’amputation partielle de sa jambe.

L’intéressé s’estimant victime d’une infection nosocomiale contractée lors de son séjour a l’hôpital, a saisi la Commission de Conciliation et d’Indemnisation (CCI) du Rhône.

La commission a mandaté des experts qui ont rendu un rapport au vu duquel la CCI a estimé, par un avis du 16 avril 2014, que les préjudices subis par le patient n’étaient pas liés à sa prise en charge médicale .

La victime a sollicité une expertise judiciaire devant le juge administratif  a refusé d’ordonner une nouvelle expertise au motif qu’elle ne présentait pas d’utilité.

Un appel est interjeté et le juge des référés de la cour administrative d’appel de Lyon, a fait droit à la demande d’expertise.

Le centre hospitalier et son assureur se sont pourvus en cassation arguant que le juge des référés de la Cour administrative d’appel aurait entaché son ordonnance d’une erreur de droit et dénaturé les règles relatives à la prescription d’une mesure d’expertise.

 Le Conseil d’État a rejeté le pourvoi dans la mesure où le juge d’appel a démontré l’utilité d’une nouvelle expertise puisque le « rapport des experts de la CRCI, ne comporte aucun élément sur le point de savoir si, en l’absence de toute contamination, l’évolution de l’état de M. A… aurait néanmoins rendu inévitable son amputation » et que « dans le cas contraire, il y a lieu d’évaluer les conséquences qu’aurait pu comporter cette infection, indépendamment de l’évolution prévisible de l’état du patient. »

Conseil d’Etat, 18 décembre 2015, n°388772

Source: legifrance

“Vu la procédure suivante :

M. B…A…a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Lyon de prescrire, en application des dispositions de l’article R. 532-1 du code de justice administrative, une mesure d’expertise relative à la prise en charge dont il a fait l’objet à l’hôpital Edouard-Herriot de Lyon à la suite d’un accident survenu le 27 août 2011. Par une ordonnance n° 1408204 du 5 janvier 2015, le juge des référés a rejeté sa demande.

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Par une ordonnance n° 15LY00141 du 27 février 2015, le juge des référés de la cour administrative d’appel de Lyon, statuant sur la requête de M.A…, a annulé l’ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Lyon et prescrit l’expertise demandée.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 17 mars et 1er avril 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, les Hospices civils de Lyon et la Société hospitalière d’assurances mutuelles (SHAM) demandent au Conseil d’Etat d’annuler l’ordonnance du juge des référés de la cour administrative d’appel de Lyon.

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

– le rapport de M. Olivier Rousselle, conseiller d’Etat,

– les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Le Prado, avocat des Hospices civils de Lyon et de la Société hospitalière d’assurances mutuelles (SHAM), à la SCP Fabiani, Luc-Thaler, Pinatel, avocat de M. B…A…et à la SCP Sevaux, Mathonnet, avocat de l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales ;

1. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés qu’à la suite d’un accident domestique survenu le 27 août 2011, M. A…a été pris en charge par l’hôpital Edouard-Herriot de Lyon ; qu’une infection confirmée par une biopsie osseuse pratiquée le 21 décembre 2011 dans ce même établissement a rendu nécessaire l’amputation partielle de sa jambe gauche, réalisée le 22 juin 2012 ; que l’intéressé a soutenu devant la Commission régionale de conciliation et d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (CRCI) du Rhône que cette infection présentait un caractère nosocomial ; qu’au vu du rapport d’expertise remis le 11 février 2014 par le professeur Magalon et le docteur Marchetti, cette commission a estimé, par un avis du 16 avril 2014, que les préjudices subis par le patient n’étaient pas liés à sa prise en charge médicale ; que, par une ordonnance du 5 janvier 2015, le juge des référés du tribunal administratif de Lyon, saisi par M. A…, a refusé d’ordonner une nouvelle expertise au motif qu’elle ne présentait pas d’utilité ; que, par l’ordonnance du 27 février 2015 contre laquelle les Hospices civils de Lyon et leur assureur, la SHAM, se pourvoient en cassation, le juge des référés de la cour administrative d’appel de Lyon, faisant droit à l’appel de M.A…, a annulé la décision du premier juge et prescrit l’expertise demandée ;

2. Considérant que la prescription d’une mesure d’expertise en application des dispositions de l’article R. 532-1 du code de justice administrative est subordonnée au caractère utile de cette mesure ; qu’il appartient au juge des référés, saisi d’une demande d’expertise dans le cadre d’une action en réparation des conséquences dommageables d’un acte médical, d’apprécier son utilité au vu des pièces du dossier, notamment, le cas échéant, du rapport de l’expertise prescrite par la commission régionale de conciliation et d’indemnisation des accidents médicaux, et au regard des motifs de droit et de fait qui justifient, selon le demandeur, la mesure sollicitée ; que M.A…, qui ne s’est pas borné à réclamer la prescription d’une contre-expertise aux seules fins de contredire les conclusions de l’expertise réalisée à la demande de la CRCI, a soutenu devant le juge des référés de la cour administrative d’appel de Lyon que les lacunes de cette expertise ne permettaient pas d’éclairer la juridiction administrative sur certains des critères du régime de responsabilité applicable ;

3. Considérant que, pour conclure à l’utilité d’une nouvelle expertise, l’ordonnance attaquée relève que ” les pièces du dossier, et notamment le rapport des experts de la CRCI, ne comportent aucun élément sur le point de savoir si, en l’absence de toute contamination, l’évolution de l’état de M. A… aurait néanmoins rendu inévitable son amputation ” et que ” dans le cas contraire, il y a lieu d’évaluer les conséquences qu’aurait pu comporter cette infection, indépendamment de l’évolution prévisible de l’état du patient ” ; qu’en se prononçant par ces motifs, le juge d’appel a implicitement mais nécessairement répondu au moyen des intimés tiré de ce qu’étant saisi d’une simple contestation des conclusions du premier rapport il n’était pas compétent pour prescrire l’expertise demandée ; qu’il n’a entaché son ordonnance ni d’erreur de droit, ni de dénaturation ;

4. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que le pourvoi des Hospices civils de Lyon et autres doit être rejeté ; qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre solidairement à la charge des Hospices civils de Lyon et de la SHAM la somme de 2 300 euros à verser à l’ONIAM et la somme de 3 000 euros à verser à M.A… ;

D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi des Hospices civils de Lyon et de la SHAM est rejeté.

Article 2 : Les Hospices civils de Lyon et la SHAM verseront solidairement la somme de 2 300 euros à l’ONIAM et la somme de 3 000 euros à M. A…en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée aux Hospices civils de Lyon, à la Société hospitalière d’assurances mutuelles, à M. B…A…, à l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales et à la caisse primaire d’assurance maladie du Rhône.”

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