Secret médical : il pèse en quasi toute circonstance !!
Le Conseil d’Etat a été amené, dans une décision du 17 juin 2015 (requête n° 385924), à rappeler que le secret médical père sur le médecin en toute circonstance
Le Conseil d’Etat avait été saisi par un médecin afin d’annulation d’une décision rendue par la Chambre disciplinaire du Conseil national de l’Ordre des médecins sur appel du Conseil départemental de l’Ordre des médecins de la Loire.
Quels étaient les faits?
Mme D. s’était rendue chez son médecin, Mme B qui avait un cabinet commun avec son mari, M. B. En attendant sa consultation avec Mme B, Mme D avait confié à M. B, au niveau du secrétariat commun aux deux médecins, les résultats d’un examen gynécologique pour lequel elle venait consulter son épouse.
Mme D. et le couple de médecins étaient par ailleurs amis de longue date.
Quelques temps après cet échange dans le secrétariat, M. B a informé un proche de Mme D. afin de l’inviter à se faire soigner lui aussi.
La chambre disciplinaire a considéré que Mme D. s’était adressée à M. B en tant que médecin, même s’ils avaient des relations amicales anciennes et qu’il n’était pas son médecin habituel. Par conséquent, leur échange, même en dehors du cabinet à proprement parler, était couvert par le secret médical qui couvre tout ce qui est venu à la connaissance du médecin, c’est à dire ce qui lui est confié mais aussi ce qu’il a vu, entendu, compris.
La Chambre a retenu une violation du secret médical et a condamné M. B à l’interdiction d’exercer pendant 3 mois.
M. B a donc saisi le Conseil d’Etat en vue de voir annuler la décision.
Le Conseil d’Etat a rejeté le pourvoi, considérant que la qualification des faits était exact et la sanction non hors de proportion avec les faits retenus.
Source : Légifrance
Pour lire l’arrêt :
Conseil d’État N° 385924 lecture du mercredi 17 juin 2015 REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS Vu la procédure suivante : Le conseil départemental de l’ordre des médecins de la Loire a transmis à la chambre disciplinaire de première instance de l’ordre des médecins de Rhône Alpes, en s’y associant, la plainte déposée par Mme A…D…à l’encontre de M. C… B…. Par une décision du 23 janvier 2013, la chambre disciplinaire de première instance a rejeté ces plaintes. Par une décision n° 11888 du 24 septembre 2014, la chambre disciplinaire nationale de l’ordre des médecins a, sur appel du conseil départemental de l’ordre des médecins de la Loire et du Conseil national de l’ordre des médecins, d’une part, de MmeD…, d’autre part, annulé cette décision et infligé à M. B…la peine de l’interdiction d’exercer la médecine pendant trois mois à compter du 1er janvier 2015. Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique enregistrés les 24 novembre 2014, 22 décembre 2014 et 18 mars 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, M. B…demande au Conseil d’Etat : 1°) d’annuler cette décision ; 2°) de mettre à la charge solidaire du conseil départemental de l’ordre des médecins de la Loire et du Conseil national de l’ordre des médecins la somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ; Vu : Après avoir entendu en séance publique : – le rapport de M. David Moreau, maître des requêtes, – les conclusions de Mme Maud Vialettes, rapporteur public ; La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M.B…, à la SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard, Poupot, avocat du conseil départemental de l’ordre des médecins de la Loire et du Conseil national de l’ordre des médecins et à la SCP Meier-Bourdeau, Lecuyer, avocat de Mme D… ; 1. Considérant qu’il ressort des énonciations non contestées de la décision attaquée que Mme D…s’est rendue le 23 décembre 2011 au cabinet médical commun à M. et Mme B…pour consulter cette dernière ; qu’en attendant la consultation elle s’est trouvée, dans le secrétariat commun du cabinet, en présence de M. B…à qui elle a confié les résultats d’un examen gynécologique qu’elle venait de subir et qui motivait sa visite ; qu’il ressort des mêmes énonciations que, quelques jours après cet échange, M. B…a informé un proche de Mme D…des résultats de l’examen dont celle-ci lui avait fait part, en vue de l’inviter à se faire soigner lui aussi ; 2. Considérant qu’aux termes de l’article L. 1110-4 du code de la santé publique : ” Toute personne prise en charge par un professionnel, un établissement, un réseau de santé ou tout autre organisme participant à la prévention et aux soins a droit au respect de sa vie privée et du secret des informations la concernant. (…) ” ; qu’aux termes de l’article R. 4127-4 du même code : ” Le secret professionnel, institué dans l’intérêt des patients, s’impose à tout médecin dans les conditions établies par la loi. Le secret couvre tout ce qui est venu à la connaissance du médecin dans l’exercice de sa profession, c’est-à-dire non seulement ce qui lui a été confié, mais aussi ce qu’il a vu, entendu ou compris ” ; que le secret institué par ces dispositions s’étend à toute information de caractère personnel confiée à un praticien par son patient ou vue, entendue ou comprise par le praticien dans le cadre de son exercice ; 3. Considérant que la chambre disciplinaire nationale n’a pas inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis en jugeant que Mme D… s’était adressée à M. B… en sa qualité de médecin, alors même qu’il avait des relations amicales anciennes avec Mme D…, que leur échange avait eu lieu en dehors de son cabinet et que celle-ci n’était pas venue le consulter ; 4. Considérant qu’il résulte, dès lors, de ce qui a été dit au point 2 ci-dessus qu’en jugeant que le secret médical couvrait ces informations confiées à M. B… en tant que médecin, même s’il n’était pas le médecin habituel de Mme D…, et que ce dernier avait par suite, en les révélant à un tiers, méconnu l’obligation de secret instituée par les dispositions des articles L. 1110-4 et R. 4127-4 du code de la santé publique, la chambre disciplinaire nationale n’a pas commis d’erreur de droit ; 5. Considérant enfin que, alors même que M. B… aurait eu une intention prophylactique en communiquant ces informations et que Mme D… les aurait elle-même révélées à d’autres tiers, la sanction d’interdiction d’exercer la médecine pendant trois mois prononcée à son encontre n’est pas hors de proportion avec les faits retenus ; 6. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi de M. B… doit être rejeté, y compris ses conclusions présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ; que, dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu de mettre à la charge de M. B…la somme que demande Mme D…au titre des mêmes dispositions ; D E C I D E : Article 1er : Le pourvoi de M. B…est rejeté.
ECLI:FR:CESJS:2015:385924.20150617
Inédit au recueil Lebon
4ème SSJS
M. David Moreau, rapporteur
Mme Maud Vialettes, rapporteur public
SCP WAQUET, FARGE, HAZAN ; SCP MEIER-BOURDEAU, LECUYER ; SCP BARTHELEMY, MATUCHANSKY, VEXLIARD, POUPOT, avocatsTexte intégral
– le code de la santé publique ;
– le code de justice administrative ;
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Article 2 : Les conclusions présentées par Mme D…au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. C…B…, à Mme A…D…, au conseil départemental de l’ordre des médecins de la Loire et au Conseil national de l’ordre des médecins.