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Impartialité des experts et activité antérieure pour les assurances

Shake_handLa Cour de cassation considère que l’inscription sur les listes des experts judiciaires n’est pas incompatible avec l’exercice antérieur de médecin-conseil pour les compagnies d’assurance.

On sait que sur ce point deux interprétations s’opposent :

  • une vision déontologique, celle de la Cour de cassation, qui considère que l’indépendance des experts, leur impartialité a pour fondement la déontologie médicale
  • une vision économique, celle de beaucoup d’observateurs, qui constatent que beaucoup d’experts vivent, parfois de façon quasi totale, des expertises mandatées par les compagnies et que ce lien financier créé une subordination, une dépendance et surtout l’envie de ne pas déplaire d’où une partialité.

On sait qu’une circulaire du ministère de la justice datant de 1975 avait enjoint les Premiers Présidents de Cour d’appel et Procureurs Généraux à veiller à ce qu’une personne attachée directement ou indirectement à une compagnie ne soit pas inscrite sur une liste d’experts judiciaires. Vœux plutôt pieux.

Dans l’arrêt du 9 avril 2015, un médecin qui avait collaboré avec une compagnie d’assurance jusqu’en 2012 avait la même année sollicité son inscription sur la liste des experts.

La demande avait été rejetée par l’assemblée générale des magistrats de la Cour au motif que son activité antérieure ne présentait pas des garanties d’indépendance suffisante.

La Cour de cassation a annulé la décision de l’assemblée générale en indiquant que la collaboration passée ne constituait pas en soi l’exercicie d’une activité incompatible avec l’indépendance de l’expert judiciaire.

La décision aurait -elle été la même en cas de continuation de l’exercice? Il faut rapprocher cette décision d’un arrêt de 2013 (Cass, Civ, 2ème, 27 juin 2013, pourvoi n° 13-60025) qui considérait que l’importance de l’activité était de nature a créé une relation d’affaires incompatible.

Cour de cassation 
chambre civile 2 
Audience publique du jeudi 9 avril 2015 
N° de pourvoi: 14-60792 
Non publié au bulletin Annulation partielle

Mme Flise (président), président 

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Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISEAU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant : 

Sur le grief :

Vu l’article 2, 6°, du décret n° 2004-1463 du 23 décembre 2004 ;

Attendu que M. X… a demandé son inscription initiale sur la liste des experts judiciaires de la cour d’appel de Paris dans la rubrique F.01.14, médecine générale ; que par décision du 3 novembre 2014, l’assemblée générale des magistrats du siège de cette cour d’appel a refusé son inscription ;

Attendu que pour rejeter la demande, l’assemblée générale relève que M. X… exerce son activité, en totalité ou en partie, pour le compte d’une compagnie d’assurances, la Mutuelle générale, dont il est médecin-conseil de manière continue depuis 2005, et retient qu’il ne présente pas des garanties d’indépendance suffisantes à l’exercice de missions judiciaires ;

Qu’en statuant ainsi alors, d’une part, qu’il résultait du dossier que M. X… avait cessé sa collaboration avec la société d’assurances depuis 2012 et que, d’autre part, le seul fait qu’il ait été médecin-conseil de celle-ci depuis 2005 jusqu’en 2012 ne constituait pas, en soi, l’exercice d’une activité incompatible avec l’indépendance nécessaire à l’exercice de missions judiciaires d’expertise, l’assemblée générale a commis une erreur manifeste d’appréciation et violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

ANNULE la délibération de l’assemblée générale des magistrats du siège de la cour d’appel de Paris en date du 3 novembre 2014, en ce qu’elle a refusé l’inscription de M. X… sur la liste des experts ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de la décision partiellement annulée ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf avril deux mille quinze. 


ECLI:FR:CCASS:2015:C200614 

Analyse

Décision attaquée : Cour d’appel de Paris , du 3 novembre 2014

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Source : Légifrance