Un dispositif en pleine expérimentation
Suite à la codification par l’article L.6316-1 du Code de la santé publique (1) , issu de la loi Hôpital Santé Patients Territoire (HPST) du 21 juillet 2009, l’expérimentation de la télémédecine est enclenchée et suscite des interrogations.
La loi du 23 décembre 2013 de financement de la sécurité sociale pour 2014, prévoit en son article 36 que des « expérimentations portant sur le déploiement de la télémédecine, définie à l’article L. 6316-1 du code de la santé publique, peuvent être menées à compter du 1er janvier 2014 pour une durée de quatre ans, dans des régions pilotes dont la liste est arrêtée par les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale. »
Selon le communiqué de presse du ministère de la santé du 26 mai 2014, neuf régions ont été sélectionnées pour expérimenter des tarifs préfigurateurs : l’Alsace, la Basse-Normandie, la Bourgogne, le Centre, la Haute-Normandie, le Languedoc-Roussillon, la Martinique, les Pays-de-la-Loire et la Picardie.
Le ministère annonce que les premiers patients pris en charge par télémédecine le seront d’ici la fin de cette année.
On peut lire sur le site internet du ministère, un dossier complet sur la télémédecine, comprenant des guides et des brochures de présentation du dispositif, décrivant notamment les objectifs poursuivis.
Le mot d’ordre principal est la réduction des inégalités par un meilleur accès aux soins des patients, notamment en zones dites de « déserts médicaux ».
Ainsi, cinq actes principaux sont réalisables par la voie de la télémédecine : la téléconsultation, la télé-expertise, la télésurveillance médicale, la téléassistance médicale et la régulation médicale.
La télémédecine et le droit
D’un point de vue juridique, la télémédecine s’inscrit dans le droit commun des activités médicales, y compris pour les droits des patients.
Cette nouvelle pratique médicale nécessairement réalisée par la voie des nouvelles technologies pose des questions juridiques.
Le rapport de la Direction Générale de l’Offre de Soins (DGOS) du 18 mai 2012 intitulé « Télémédecine et responsabilités juridiques engagées » tente de répondre à certaines de ces interrogations.
Obligation d’information (article L. 1111-2 du Code de la santé publique), tenue du dossier médical, consentement, secret professionnel sont autant d’obligations classiques du praticien quoi doivent se concilier avec la télémédecine.
A ces notions connues, s’ajoutent celles liées à l’utilisation des nouvelles technologies.
Le rapport rappelle, à juste titre, qu’au visa de l’article L.1142-1 du Code de la santé publique posant le principe de la responsabilité sans faute, la télémédecine utilisant du matériel assimilé à un dispositif médical, l’établissement est tenu à une obligation de sécurité de résultat pour l’utilisation de ce matériel.
Il pèse ainsi indirectement sur le médecin un devoir de compétence quant à l’utilisation de ces nouvelles technologies.
Si le rapport de la DGOS conclu sur un conseil pratique tenant à préconiser la rédaction d’un avenant au contrat d’assurance en responsabilité civile professionnelle, il n’en demeure pas moins que la position des juridictions qui pourront être amenées à trancher les difficultés d’ordre juridique sur la télémédecine est à ce jour inconnue.
Quant à l’Ordre National des Médecins, il a récemment publié sur son site internet la déclaration commune du Conseil Européen des Ordres des Médecins sur la télémédecine proposée par l’Ordre des médecins français (13 juin 2014).
On peut y lire notamment que « La pratique de la médecine à distance amplifie le degré de vigilance sur les contraintes de sécurité relatives à la confidentialité des données médicales, à la robustesse et à la fiabilité des organisations techniques utilisées. », que la formation des médecins aux technologies de l’information est vivement préconisée et qu’à l’échelle européenne, une coordination entre les Etats membres est attendue.
(1) “La télémédecine est une forme de pratique médicale à distance utilisant les technologies de l’information et de la communication. Elle met en rapport, entre eux ou avec un patient, un ou plusieurs professionnels de santé, parmi lesquels figure nécessairement un professionnel médical et, le cas échéant, d’autres professionnels apportant leurs soins au patient.
Elle permet d’établir un diagnostic, d’assurer, pour un patient à risque, un suivi à visée préventive ou un suivi post-thérapeutique, de requérir un avis spécialisé, de préparer une décision thérapeutique, de prescrire des produits, de prescrire ou de réaliser des prestations ou des actes, ou d’effectuer une surveillance de l’état des patients.
La définition des actes de télémédecine ainsi que leurs conditions de mise en œuvre et de prise en charge financière sont fixées par décret, en tenant compte des déficiences de l’offre de soins dues à l’insularité et l’enclavement géographique.”